Articles

Affichage des articles du juin, 2021

La parole assassinée

Que n’as-tu vu, McBeth, la forêt s’avancer, Mienne j’ai vu reculer jusqu’à l’exil, Elle n’est plus que cendres l’Armorique Semences perdues au vent des falaises, d’arbres pas assez Guère plus que le granit pour reboiser nos iles Nos peines sont rebelles, nos peurs anecdotiques. Rage : est-ce qu’on irrigue avec de trop violents orages ? Haine : est-ce que l’on prostitue le troupeau pour la laine ? Colère : faible est la lumière des éclairs et des tonnerres ! Orgueil : a trop vivre debout, des martyrs portons le deuil. Il était jadis des sentiers ombragés menant à Kerievel Une ombre salutaire auprès de la chapelle de St Egarec Sous le macadam meurt la bruyère nouvelle Ne vivons-nous que de défaites et d’échecs ? J’ai en bouche gout âpre et amer Lorsque je souhaiterais réminiscence du lait de ma mère Des accents faux et rances Du langage de France Il est dans ma tête des images d’Eden Que je ne sais décrire en mots maternels Des visions d’Adam le Chouan et Eve la bigouden Du temps ou l’Ar

Breizh Daviken

  Quand le quartz de ton granit rose Sourit au soleil timide venu sécher Les larmes de sel sur les rochers La marée déserte les galets, consacrant la métamorphose Je sens ta boue couler dans mes veines Le réconfort de tes bras s'ouvrir à mes peines Tu es ma terre.   Çà et là les casemates où nous jouions enfants Cicatrices d'un passé pourtant révolu Les abers te fécondent et te mettent à nu Tes falaises impudiques se donnent au vent Creusant au creux des menhirs des berceaux pour les hommes Pour que nous n'oublions jamais qui nous sommes Tu es ma terre   Les fougères rousses recouvrent tes sentiers outragés Là où jadis l'on se battit pour l'honneur des bigoudens Pour que sous leur coiffe demeure l'âme d'une reine Enterrés, nos dessins autonomes, pour mieux les moissonner Tu nous auréolais d'un regard complice Nous bénissant de tes tempêtes pour que notre lutte s'accomplisse Tu es ma terre   Semée, labourée, polluée, irradiée sans rancune Tu nourris t

Au fond du verre

Au fond du verre Un iceberg sur eau brune Un rai de lumière Fondant sur clair de lune Au fond du verre Les espoirs engloutis La noyade qu’on veut taire Morceaux de vie-éboulis Au fond du verre La force d’attendre Ultime lit de fougères O ù les faibles peuvent s’étendre Au fond du verre Une bataille sans trêve Gloires éphémères Ombres de rêves Au fond du verre Une caresse de soie Une bouffée d’air L’image meurtrie de soi Au fond du verre L’homme refusant de na î tre La vérité amère La dernière porte ouverte Au fond du verre Le souvenir de ton sourire Armistice de toutes mes guerres Et ma peur de mourir.

Je suis né à Quimper

Quand je vois un cul de jatte, ça m’épate (lui qui n’a plus les siennes).A-t-il  fait exprès de perdre ses jambes, comme un gecko sa queue ? Ça me fait une belle jambe. Quand je vois un manchot, les bras m’en tombent : Je lui propose un coup de main, hier comme aujourd’hui. Je lui demande qui l’épaule, et s’il se berce d’illusions, s’il travaille, maintenant qu’il ne peut plus mettre la main à la pâte. Ses cubitus sont-ils tombés comme feuilles à l’automne ? A-t-il planté ses humérus dans l’humus, pour qu’ils poussent ? Comme c’est repoussant ! On me dit que non, bien sûr, aucun humain ne se défait volontairement de sa chair, c’est un accident. Pourtant ma mère, elle, s’est séparée de sa chair, le jour où elle m’a déposé dans un panier sur le trottoir devant la mairie. Est-ce que la mère rit devant ce coup fin ? Ce devait être un accident, ou elle était distraite, je suis tombé du porte-bagage. Mais non, personne n’est venu me réclamer. Ça a dû aller trop vite, j’ai raté l’effet-mère.

L’école de la vie

Je suivais les arbres se rendant à la kermesse Et les falaises nous faisaient belle escorte C’était les jeunes heures où Dieu était allégresse Nos prières ne restaient jamais lettre morte. Je suivais les sentiers mercenaires dans leur envol Les taquines fougères fouettaient mes jambes nues Légères étaient mes peines encore et mon cœur bénévole Accompagnait les anges qui chevauchaient mes rêves à cru. Je suivais les rochers dans cette mémoire à marée basse Des calvaires hilares parsemaient ma route obscure Des troupeaux de lumières ombrageaient mes traces J’avais déjà le verbe haut mais encore la langue pure. Je suivais le quotidien avec ses surprises Ma besace pleine de pièges à grives et de bons mots L’orage paternel offensait le ciel de ses lucarnes grises Je coloriais mes citadelles de pétales et d’émaux. Puis il y eu les conseils : je ne les ai pas suivis Il y eu des jachères et des caniveaux dans mon éducation O ù étaient la lande, et les goélands à l’école de la vie ? Alors j’ai

Southampton sous la pluie

Il pleut sur Southampton Le taxi est en retard, je panique J’essaie de pas en faire des tonnes, Je ne prends que l’avion, pas le Titanic. Il pleuvra aussi s û rement sur Brest O ù personne prénommée Barbara ne m’attend Question flotte la Bretagne n’est jamais en reste Peu importe la météo, j’ai le temps. Il pleut aussi dans ma tête Ç a déborde par les yeux Sous mon cr â ne la tempête D’un cœur à l’agonie chaque jour plus vieux Une partie de ma chair est restée à Cardiff Sur le quai de la gare Un bref baiser, une caresse dans les tifs Une petite fille avec des larmes dans le regard.

Pêcheur de perles (à mon ami Patrick Musimu)

Mon destin aussi carré Que la voilure de mon embarcation Je cherche, moi aussi, L’or du temps entre les requins hilares Et le rêve que tu incarnes. La Mer Rouge porte le deuil De mes oreilles percées. Autour d’elles le gris s’accroit A chaque descente dans l’abysse, La frontière entre la vie et la mort Aussi mince qu’une bouffée d’oxygène... Le partage entre la richesse et mon sort Dépend de ta présence au creux de mes mains. Les espoirs s’effilochent au gré Des grains de sable. Je poursuis ta forme ronde Tu luis dans mon sommeil trop bleu L’astre royal cuit les rochers  Sous les larmes rouges de mes pieds. Les étoiles brillent maintenant sous mon cr â ne Il ne me reste plus que quelques secondes A peine assez pour remonter Vers l’écume blanche de l’ennui. Tu es à portée de mes doigts Si je te possède je perds la vie Si je renonce à toi  Je mourrai de ne t’avoir pas cueillie. Une lame de fond m’éloigne Tu danses dans les remous J’emporte ton souvenir pour aller voir Si les cieux sont f

L’indifférence

Quand le soleil se couche Et qu’il se fait tard Les mots sortent de ma bouche Et les notes de ma guitare Quand un homme se met à chanter C’est qu’il a des choses à dire C’est qu’il veut faire partager Ce dont la vie l’a fait souffrir Bien sûr, partout il y a la guerre Un monde de meurtres et de violence Y a aussi des gens vulgaires Mais y a bien pire quand on y pense Refrain : Et puis y a surtout les indifférents Ils sont pas comme nous ces gens Alors tu te demandes pourquoi Et tu cherches tes différences Mais tout ce qu’ils ont pour toi C’est leur indifférence Et ils s’en foutent que t’en crèves  Tant que c’est pas sur leur paillasson Se foutent que ça brise tes rêves Casse tes illusions Bien sûr y a la menace atomique Des Ethiopiens qui crient famine Y a aussi des filles syphilitiques Des travailleurs qui meurent à la mine. Y a encore des pays de terreur O ù ceux qui refusent de se taire Sont fusillés pour cette erreur, Pour des idées égalitaires On vit un monde bien dangereux O ù

Conseils d’un père

Alors mon fils tu crois pouvoir dire La différence entre vérité et mensonge Entre le meilleur et le pire La fausse réalité et le vrai songe Entre les silences inquiétants Et les bruits de foule qui rassurent Le feu d’un regard br û lant Et la glace qu’on brise d’un murmure Reconnais-tu la haine de l’amour Et l’été de l’hiver Quand na î t la nuit et meurt le jour Aujourd’hui c’est déjà demain et encore hier Penses-tu qu’on échange Les héros contre des lâches Les choses simples pour des mystères étranges La débauche contre une vie sans tâches Et saurais-tu reconna î tre Les grimaces d’amour et les sourires hypocrites Les gens biens et ceux malhonnêtes Les paroles réfléchies et les mots dits trop vite Connais-tu des milliardaires Qui échangeraient leur fortune contre la misère Combien d’aveugles donneraient leur vie entière Contre un peu de lumière Donnerais-tu ton cœur  Au cardiaque qui se meurt Quand on ne tend même pas la main A l’enfant qui a faim Alors tu crois pouvoir dire La différ

Je t’ai cherchée

Dans mes balbutiements de nourrisson, je t’ai cherchée. J’essayais d’entendre ta présence libératrice dans la cacophonie de mon hochet, à travers les mailles de mon parc, sur le sein de ma nourrice, dans la douceur suave de mon biberon. Par intuition. Dans mes tâtonnements d’enfant, en marge de mes cahiers, dans les contours des dessins inavouables de mes camarades, au creux d’un écrin providentiel, je t’ai cherchée. But ultime de nos jeux de marelle, à cloche-pied, je te poursuivais. Par adoration. Dans mes rugissements d’adolescent, à coups de décibels insolents sur ma guitare insoumise, je t’ai cherchée. J’ai brandi des étendards à ton effigie pour que tu existes dans mes rêves sanglants et justifie ma révolte. Par vocation. Dans mes marmonnements d’homme, entre deux pauses café, je t’ai cherchée. Sous les rides pointaient la maturité qui faisait semblant de comprendre et l’adulte qui se lassait de t’attendre. La survie se nourrit de compromis que la raison adore. Par soumission. Da